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Composé de Bruno Sanchioni (BBE) et de Guiseppe Chierchia, Age Of Love est un projet qui réalisa, en 1990, un titre :

 

The Age Of Love

 

Ce titre, tout le monde le connait autrement.

 

 

En effet, il faudra attendre la fin d'été 1992 pour que Jam & Spoon le ressuscitent et que le succès soit au rendez-vous avec :

 

The Age Of Love (Watch Out For Stella Mix) (1992)

 

 

Cette version a eu tellement d'impact qu'elle est considérée comme l'élément déclencheur du style "Trance". Pour ceux qui le connaissent pas, l'introduction est, certes, longue. Cependant après le fameux "Come on, dance with me, move your body and lots of beats", c'est le début de l'extase et de la trance.

 

C'est seulement à partir de 1997 et avec la nouvelle version radio de "Watch Out For Stella Mix" qui marchera notamment en Hollande et en Finlande, qu'on aura droit au clip vidéo :

 

 

 

 

Modifié par Lycanos
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En effet, quel titre ! A son arrivée en club, un véritable carton !

Merci.

Modifié par Bidoul
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Il n'y avait pas encore eu de sujet dédié ?

On en a pourtant parlé à de nombreux endroits sur le forum !

C'est clairement un méga classique !

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Je préfère la version 1997, uniquement pour sa compression dans la durée. Mais la version 1992 est emblématique du mouvement trance.

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Étonné que le topic n'existait pas déjà !

Un des chefs-d'oeuvres de la Trance !

Bon, la toute première version, je l'aime moins, car je trouve que les vocaux masculins gâchent le truc (surtout la manière dont il prononce "age of love", on a trop l'impression qu'il se fout de la gueule du truc!).

Dans la version de 92, il y a juste un élément qui me dérange, c'est le son qui monte fort dans les aigus, il fait mal aux oreilles !

La version de 97, c'est avec celle-là que j'ai connu ce titre (grâce au Top Hits 97 volume 5). Coup de coeur immédiat ! La version parfaite, pour moi.

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il y a 49 minutes, Sangore a dit :

Étonné que le topic n'existait pas déjà !

C'est étonnant mais après recherche il semblerait bien que non en effet :P

 

J'aime beaucoup la version de Jam & Spoon moi aussi, c'est clairement un gros gros classique intemporel :ok:

Je n'ai pas d'autres remixes en tête qui m'ont plu, il y en a eu tellement en tout, mais certains doivent valoir le détour, à réécouter donc !

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Il y a 2 heures, Sangore a dit :

Bon, la toute première version, je l'aime moins, car je trouve que les vocaux masculins gâchent le truc (surtout la manière dont il prononce "age of love", on a trop l'impression qu'il se fout de la gueule du truc!).

 

La version que tout le monde a retenu c'est celle qui est expurgée du vocal inintéressant :
 

Age Of Love - The Age Of Love (Boeing Mix) (1991)

 

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il y a 44 minutes, chrisAtWavosaur a dit :

La version que tout le monde a retenu c'est celle qui est expurgée du vocal inintéressant :
 

Age Of Love - The Age Of Love (Boeing Mix) (1991)

 

Ah oui, tout de suite c'est mieux !

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Posté (modifié)
il y a 56 minutes, chrisAtWavosaur a dit :

 

La version que tout le monde a retenu c'est celle qui est expurgée du vocal inintéressant :
 

Age Of Love - The Age Of Love (Boeing Mix) (1991)

 

 

Il y a surtout le New Age Mix pour lequel le Radio Edit que j'ai publié, est la version radio. J'avais oublié qu'il y avait, en plus, un vocal qui gâche tout. Erreur réparée :

 

 

 

Modifié par Lycanos
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La version de 92, LE titre qui ma fait aimer la trance :wub:

 

Un monument a tout jamais !

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Il y a 10 heures, Sangore a dit :

Dans la version de 92, il y a juste un élément qui me dérange, c'est le son qui monte fort dans les aigus, il fait mal aux oreilles !

L'esprit dans un état second, aide à la digestion du morceau :blush:

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Le Boeing Mix de The Age Of Love, sûrement un des premiers titres trance diffusés sur les FM nationales en France, en 90-91, un des premiers à avoir été signés chez un label important chez nous également, chez Airplay ! Pour moi un classique indémodable, dans quasiment toutes ses versions de l'époque ! J'ai su des années après que la voix féminine du titre, celle qui prononce les mémorables Come On, Dance With Me, Move Your Body & Lots Of Beats, c'était celle de.. Karen Mulder, oui la célèbre top model qui devait être à peine majeure à l'époque.

 

Quant à Giuseppe Cherchia, c'est un autre nom qu'on ne pouvait pas forcément s'attendre à trouver ici, puisque ce n'est autre que le vrai nom de Pino D'Angio, celui qui avait signé le multiple fois samplé Ma Quale Idea.

 

La dernière version que j'ai entendue de ce titre qui sera toujours remixé régulièrement, et d'ailleurs j'avais du en parler dans son propre topic, c'est celle de RAM, réalisée en 2017.

 

 

Et même si elle est loin de faire partie de mes préférées, j'ai réécouté y a pas si longtemps la version plus electro sortie à la fin des années 2000 du Français Da Fresh, basée comme souvent davantage sur le Watch Out For Stella Mix de J&S.

 

 

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Je rejoins l'avis général, un titre cultissime, indémodable, que j'adore aussi - la version par Jam & Spoon en tout cas. Pour moi ça va avec le "Cafe del Mar" de Energy 52, fondateurs de la trance. Rah et ce fameux break :coeurs:!

 

Merci Lycanos pour avoir posté la version originale, je me rends compte que je ne la connaissais en fait pas! Contrairement à vous j'aime beaucoup le rap dessus et le coté hypnotique, meme si au final ça fait très bizarre de ne pas avoir les fameux vocaux féminins, si on peut appeler cela comme ça, qui font la mélodie que tout le monde connait dans la version Jam & Spoon.

 

Je n'avais pas vu que RAM en avait fait un remix... je n'aime généralement pas du tout ce qu'il fait, donc j'ai eu peur, mais je trouve que c'est une belle actualisation du titre qui ne dénature pas trop et qui ajoute le petit coté uplifting.

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Le remix de Fred Baker et Mr Sam en 2004 était très sympa également, mais comme toujours à l'époque avec Mr Sam, ça dépassait les 10 minutes ! ;)

 

 

Mais il y en a un que j'aime peut-être encore plus que les autres, celui de Brainbug en 98, qui reprenait les violons grinçants de Nightmare!

 

 

 

Et j'ai oublié d'en parler, mais Bruno Sanchioni a tenté à deux reprises de surfer sur le succès des remixes de son titre.

 

Et tout d'abord en 92 évidemment, après le succès des remixes de J&S, il proposait en toute fin d'année le titre Al.le.lu.ja qui reprenait toute la base musicale du titre originel.

 

 

Et en 1995 sous son propre nom, il proposait The New Age, là le titre y fait carrément référence, en plus de la partie musicale. Je ne sais pas trop s'il n'avait pas été lésé d'une façon ou d'une autre, d'où la volonté de tenter ces coups, mais en tous cas il n'a jamais repris les apports de J&S. Ce titre n'est sorti en France qu'en 97, au moment de la sortie...des remixes 97 de The Age Of Love.

 

 

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Posté (modifié)

Je retiens les remixes de RAM, Mr Sam vs. Fred Baker avec une mélodie plus différentes et celui de Brainbug avec sa patte "Nightmare".

Et, comme tout le monde, je retiens surtout la version 97 où on met plus en valeur, la fabuleuse mélodie angélique. :coeurs:

 

Pour info et pour revenir à la version 1997, en réalité, il s'agit d'une légère retouche du "Watch Out For The Stella Radio Edit" de 1992 introuvable sur Youtube, étant lui-même un savant mélange entre le "Watch Out For The Stella Club Mix" et les percutants passages d'un autre remix de Jam & Spoon :

 

The Age Of Love (Sign Of The Time Mix)

 

 

Modifié par Lycanos
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Il y a quelques temps, il y a eu un article sur le Decadancebook consacré à la genèse de The Age Of Love, mais aussi à l'évolution de la carrière de ses créateurs et de Diki Records, et avec pas mal d'infos exclusives qui viennent corriger ce qu'on pouvait lire ici ou là, c'est un superbe article hyper complet qui méritait qu'on prenne le temps de l'évoquer ici, mais c'est vraiment très long, même si c'est passionnant, ça a contribué à ce que je remette ça à plus tard ! :P 

 

https://decadancebook.wordpress.com/2021/01/22/age-of-love-the-age-of-love-diki-records/

 

Je me mets finalement à la traduction ici même, mais je pense faire ça en deux fois ou trois, ça fera peut-être d'ailleurs un peu moins "énorme pavé" à lire.

 

Citation

 

[...]

La trance de cette période est la fille de la techno européenne, qui vise à bercer l'émotivité et à ne pas se contenter de satisfaire les besoins du mouvement, en limitant les éléments plus agressifs typiques de la musique rave au profit d'échafaudages harmoniques et mélodiques imprégnés de sons new age, ambiants et typiques. "Une musique pour l'esprit et l'âme", dira-t-on un peu plus tard. "The Age Of Love" épouse exactement ce concept.

 

Le Flying Mix, enregistré sur la face vocale (plus deux autres versions rattachées à la face profonde, le New Age Mix et le Boeing Mix, dérivés de la même idée, ainsi qu'une version radio plus courte) est un rêve d'un peu moins de six minutes, dans lequel des gribouillis célestes adoucissent le martèlement de la grosse caisse à quatre éléments.

 

Un arpège sinueux est ajouté à un bref insert vocal qui a été attribué jusqu'à présent, même par des sources considérées comme fiables telles que Wikipedia et Discogs, à Karen Mulder, un célèbre mannequin néerlandais, mais comme nous le verrons plus tard, son implication est totalement infondée. Une voix masculine plus rude contrebalance la première. C'est celui de Giuseppe Chierchia, connu du grand public sous le nom de Pino D'Angiò, qui est entré dans les annales pour le tube de 1980 "Ma Quale Idea", porté par un motif de basse caractéristique inspiré de "Ain't No Stoppin' Us Now" de McFadden & Whitehead, peu de temps auparavant. L'orchestre de "The Age Of Love" est un musicien italien vivant en France, Bruno Sanchioni.

 

En 1990, le disque est publié en 12″ et 7″ par un label belge, DiKi Records de Roger Samyn, produit dans l'arrière-boutique de son magasin de disques, le Disco King à Mouscron, auquel le nom lui-même fait référence (DiKi est un acronyme de Disco King). En 1990, cependant, rien ne s'est produit comme attendu. Une poignée de licences (en France et en Allemagne, sur Airplay Records et ZYX Records respectivement, qui ont mis le titre sur quelques compilations dans l'espoir de couvrir au moins les frais) laissent penser à un flop.

 

Il a fallu deux ans pour que la situation soit complètement inversée, grâce à un remix d'un duo allemand formé à Francfort en 1991, Jam & Spoon. Leur Watch Out For Stella Club Mix remet tout en question à travers une schématisation différente des éléments de départ qui renforce le pouvoir hypnotique de la version originale, atteignant des résultats virtuoses inattendus. À partir de ce moment-là, tout a changé pour The Age Of Love.

 

Jam El Mar se souvient aujourd'hui : " Nous avons reçu la proposition de remix d'un label britannique, React. Pour moi, la version originale était déjà un succès et tout le monde la jouait dans les clubs spécialisés de Francfort. Je me souviens quand Mark Spoon est venu au studio et a dit "hey, nous devons remixer "The Age Of Love !". J'ai dit : "Bon sang, c'est ça". Il ne nous a fallu que deux jours pour terminer le travail, nous étions dans une phase très créative et inspirée, nous avons trouvé le bon flux, ce qui n'arrive malheureusement pas très souvent. Nous avons reconstruit la séquence originale avec un Yamaha TX802 et un sampler Akai S1000, les sons de rêve provenaient d'un Oberheim Xpander, les chorus dans le break d'un E-mu Proteus et le pad d'un Roland D-50. Au Watch Out For Stella Club Mix, nous avons ajouté une deuxième version, le Sign Of The Time Mix, dans un beat brisé qui était une sorte de Dub Mix, pour utiliser un terme en vogue à l'époque. Les droits sont passés par différents labels au fil des ans et je suis presque sûr que plus de 500 000 exemplaires ont été vendus, peut-être plus, mais je n'en suis pas sûr. Le prix du remix était de 1 000 £ et nous n'avons rien su d'autre après sa livraison. Malheureusement, je n'ai jamais eu la chance de rencontrer Sanchioni et Chierchia, même si j'ai beaucoup joué en Belgique. Je pense qu'ils ont aimé notre version parce qu'ils ont proposé de produire un album entier de Age Of Love, un projet qui n'a pas abouti parce que nous étions déjà occupés avec le LP de Jam & Spoon. "The Age Of Love est sans aucun doute l'un des premiers morceaux de trance de l'histoire, et il est devenu une sorte de modèle pour de nombreuses productions ultérieures. La scène techno est de plus en plus liée aux remixes (j'ai entendu Nina Kraviz le jouer plusieurs fois ces dernières années) et je suis aussi heureux qu'honoré d'avoir mis la main sur un tel titre avec Mark, mais il ne faut pas oublier ce que Sanchioni et Chierchia ont fait ; sans la version originale, il n'y aurait jamais eu de remix."

 

Des maigres licences de 1990, on est passé à des dizaines de demandes provenant de toute l'Europe et même des États-Unis. Dig It International, de Milan, a repris les droits italiens et a réédité le titre en 1992 sur l'un de ses nombreux labels, S.O.B. (Sound Of The Bomb). Une nouvelle série de remixes est arrivée en 1997 avec des versions de Paul van Dyk, Secret Knowledge, Baby Doc et Emmanuel Top, suivie par d'autres en 1998 par Brainbug et Johnny Vicious. Mais la liste devient infinie si l'on étend la recherche au nouveau millénaire avec d'autres remixes de Marco V, Mr. Sam & Fred Baker, Marc Et Claude, Cosmic Gate, Wrecked Angle, Abel Ramos & Matt Correa, Manu Kenton, Koen Groeneveld, Wippenberg, Franco Maldini, Manuel De La Mare, Tempered DJ's, Sub Scape, Syndaesia, Ed Solo, David Forbes, Solomun et d'autres, pas toujours officiels. Il est clair qu'un peu plus de trente ans après sa sortie, "The Age Of Love" est devenu un authentique classique indémodable, proposé et apprécié même par des DJ d'une autre génération que celle qui l'a vu arriver chez les disquaires pour la première fois.

 

De même, la pochette, liée à l'iconographie sacrée, est devenue un élément distinctif. Contacté pour l'occasion, son concepteur, Patrick Gypen a déclaré : "J'ai grandi dans une famille catholique avec une solide éducation religieuse. Dans ma chambre, il y avait une petite statue de la Madone que ma mère m'avait rapportée de Lourdes. Pendant la journée, il "absorbe" la lumière du soleil et la restitue la nuit dans une lueur verdâtre, semblable à celle des lucioles. La Vierge étant le symbole de l'amour, il m'a semblé approprié d'utiliser son image lorsque, des années plus tard, j'ai dû concevoir la couverture d'une chanson intitulée "The Age Of Love". J'ai commencé à dessiner des pochettes de disques au début des années 70. Vers le milieu de la décennie suivante, je travaillais pour des maisons de disques belges et néerlandaises telles que Indisc, USA Import Records, ARS Records, Sony, EMI, R&S, DiKi Records et plusieurs autres qui ont vu le jour en Belgique pendant l'ère du new beat, à partir de 1988. Mon travail s'est accéléré de façon spectaculaire après l'achat d'un Apple Macintosh SE/30 en 1989, avec lequel je pouvais enfin créer une couverture entière (illustrations vectorielles, lettrage avec des caractères que j'ai conçus, logo et autres) sans devoir recourir à la photocomposition ou aux studios de reproduction, qui consistent à copier des documents ou des images sur différents supports. Le dessin était sauvegardé sur une disquette, puis transféré directement sur le film à l'aide de PostScript combiné à une Linotronic ou une Compugraphic. Si la musique a pu être enregistrée numériquement à l'aide d'ordinateurs, de boîtes à rythmes et d'échantillonneurs, il en va de même pour les illustrations, les couvertures étant entièrement produites numériquement à l'aide des logiciels Adobe bêta tels qu'Illustrator 88 et Separator. La plupart des reprises que j'ai faites, cependant, je les ai faites sans écouter la chanson, et c'était aussi le cas pour "The Age Of Love". Roger Samyn était un habitué de USA Import Records à Anvers à l'époque, il avait un partenariat pour importer des disques des USA. Les livraisons étaient effectuées chaque jeudi, le jour où le matériel en provenance d'outre-mer était dédouané. En pratique, José Pascual, propriétaire du magasin USA Import, Dieter Hessel de Music Man à Gand et Samyn avec son Disko King à Mouscron, ont acheté des singles et des albums qui n'étaient pas disponibles en Belgique et ont partagé les frais d'expédition. Pendant qu'ils écoutaient les disques qu'ils avaient commandés, moi, en tant que DJ, je choisissais ce que je pensais être les meilleurs disques à passer dans les clubs où je jouais. L'appartement dans lequel je vivais et le studio dans lequel je travaillais se trouvaient dans le même bâtiment que le magasin de disques, mais au dernier étage, de sorte que les relations avec les clients étaient bonnes et rapides. La plupart des commandes de nouvelles reprises arrivaient le jeudi, comme pour "The Age Of Love" et d'autres que j'ai faites pour DiKi Records, notamment "Baby Phibes" de Dr. Phibes et "Acid Rock" de Rhythm Device. The Age Of Love", cependant, reste particulièrement spécial pour moi.

 

Lorsque j'ai acheté le Macintosh SE/30, j'ai rejoint TypeLab, un consortium de créateurs de caractères dont l'objectif était de briser le monopole détenu par les grands fabricants tels que Linotype, Monotype et autres grands fournisseurs de polices graphiques. Notre groupe comprenait des designers célèbres tels que Martin Majoor et Erik Spiekermann, ainsi que des "révolutionnaires" tels que Neville Brody et moi-même. Brody était le designer en charge de deux magazines de tendance britanniques renommés, The Face et Arena. Il m'a beaucoup inspiré en utilisant Illustrator 88 comme outil de dessin de lettrage vectoriel pour créer les caractères que j'ai utilisés d'abord pour "Elle Et Moi" de Max Berlin et ensuite pour "Pump Up The Jam" de Technotronic, ainsi que de nombreux autres qui sont venus plus tard. Lorsque ces polices sont devenues originales et disponibles en PostScript, utilisé sur la plate-forme Macintosh, nous avons essayé de trouver un moyen de les distribuer et de les vendre. Bien que je ne sois qu'un petit novice dans le domaine des logiciels, j'ai réussi à devenir bêta-testeur et consultant pour Adobe, avec qui j'ai établi une relation de travail étroite. Une semaine exactement avant que Samyn ne me demande de concevoir la couverture de "The Age Of Love", Adobe m'a envoyé cinq disquettes contenant la version alpha de Photoshop. Ce jour-là, j'ai également reçu un prototype de scanner couleur d'une entreprise d'Anvers avec laquelle je travaillais en tant que bêta-testeur, Agfa-Gevaert. J'avais hâte d'essayer ces deux nouveaux produits passionnants dès que possible. La configuration du scanner m'a demandé beaucoup de temps et d'efforts. Il devait être connecté à l'aide d'une interface SCSI et il m'a fallu plus d'une journée pour le faire fonctionner correctement.

 

Pour le tester, j'ai cherché dans mon atelier une image appropriée et, entre autres, une carte postale avec la Vierge Marie et son cœur en feu est apparue. Il a été imprimé en couleur sur une vieille carte mesurant 7 x 11 centimètres et était destiné à commémorer la première communion d'une personne. Une fois numérisé à 72DPI (la résolution la plus élevée que le scanner pouvait atteindre), j'ai stocké le fichier sur une disquette et je suis passé à l'installation de Photoshop. Tout d'abord, j'ai dû faire de la place sur le disque dur en supprimant 40 Mo et en transférant le contenu sur une autre disquette de 1,44 Mo. À ce stade, j'étais prêt à installer le logiciel et à apprendre à l'utiliser. L'écran carré du Macintosh SE/30 faisait 23 centimètres, en noir et blanc bien sûr. La coloration de l'image s'est faite à l'aide de couleurs définies en partie par le RVB et les niveaux de gris, sans pouvoir s'appuyer sur des tests car les imprimantes couleur n'étaient pas encore disponibles. Malheureusement, sur le système Apple 6.0, la version alpha de Photoshop plantait toutes les dix minutes, mais j'ai fait de mon mieux pour que la couverture de ce disque soit aussi bonne que possible. Le lettrage blanc montre des pixels sur les lettres parce que Photoshop n'a pas pu lisser les caractères vectoriels. Après avoir modifié l'image et dessiné un nouveau cœur, j'ai ouvert le fichier dans Illustrator, l'ai agrandi et ajouté le titre en rouge. Le seul logiciel que je pouvais utiliser à l'époque pour séparer les couleurs de l'image était Separator d'Adobe, mais il ne fonctionnait qu'avec les fichiers générés par Illustrator 88. Avant cela, je n'avais jamais essayé de mettre une image couleur basée sur des pixels sur une page vectorielle, puis de séparer les couleurs de RGB à CMYK (nécessaire pour l'impression) sur quatre films différents. Une fois le travail terminé, nous avons sécurisé le fichier sur un disque dur (une sauvegarde qui a pris un quart d'heure !), puis nous avons envoyé la première de couverture, sur une disquette de 1,44 Mo, à la seule entreprise en Belgique qui disposait d'une machine à écrire PostScript. Il est arrivé à destination après les heures de travail, mais un de mes amis qui dirigeait l'endroit a décidé de lancer le processus d'imagerie quand même, vers 20 heures. Vers minuit, j'ai reçu son appel téléphonique : le Raster Image Processor, le dispositif utilisé pour transformer les vecteurs et les pixels de l'image et convertir les couleurs RVB en CMJN, travaillait d'arrache-pied et cela se voyait à la lumière clignotante du Mac, mais l'image finale n'était toujours pas visible. Ce n'est que le lendemain matin que les quatre dossiers étaient enfin prêts à être développés.

 

C'est à ce moment-là que mon ami imprimeur m'a demandé comment j'avais réussi à combiner des fichiers couleur en pixels avec de la typographie vectorielle et à les fusionner en un seul fichier. Pour lui, c'était une "révolution de la reproduction" et il avait raison. Heureux que l'expérience ait été réussie, j'ai commencé à utiliser des fragments de la couverture et à faire de nouveaux dessins dans Photoshop, les passant dans Illustrator 88 pour ajouter les titres des morceaux et les informations sur la production. Une fois les séparations de couleurs mises en place, il restait une dernière étape à franchir avant de remettre le tout à l'entreprise qui allait imprimer les couvertures. Les studios de machines à écrire avaient un format robuste, mais ils n'avaient pas beaucoup d'espace. Les studios de dactylographie avaient un format standard pour les images sur papier ou film photographique. Les dimensions des pochettes de microsillon et de 12″ étaient de 31,5 x 31,5 centimètres, avec une marge supplémentaire de 0,3 centimètre sur tous les côtés et de 0,5 pour la côte latérale. La taille maximale des pages était de 27,9 centimètres, ce qui n'est pas suffisant. Pour surmonter le problème, j'ai réalisé de nombreuses couvertures avec un bord blanc et j'ai également acheté un appareil photo repro avec lequel je pouvais agrandir les images et les reproduire indépendamment sur pellicule dans la chambre noire. C'étaient des années où tout changeait dans le secteur graphique et, par pure coïncidence, tous les outils sont arrivés dans mon studio pour que je puisse adhérer immédiatement à la révolution en cours. Étant donné le caractère pionnier de ce secteur, j'ai immédiatement été engagé comme consultant et développeur par Adobe, Apple, Agfa-Gevaert, Mannesmann Scangraphic, Compugraphic et d'autres grandes entreprises spécialisées dans ce domaine. Plus de trente ans se sont écoulés depuis la sortie de "The Age Of Love", mais je pense que la chanson et la reprise sont toujours aussi pertinentes. Il existe également des versions graphiques réalisées par d'autres, mais je ne pense pas qu'aucune d'entre elles puisse égaler ou battre l'original. Cette image était pure, évolutive, émotionnelle, rêveuse, sensuelle, chaleureuse, abstraite, inspirée, religieuse et controversée, tout à la fois. C'est pourquoi je n'y changerais rien.

 

Paradoxalement, les auteurs sont les moins disposés à parler de "The Age Of Love". M. Sanchioni, qui s'est toujours montré réticent à être interviewé (celui-ci est certainement une exception), n'a jamais répondu à nos invitations répétées à faire une déclaration. Au lieu de cela, Chierchia révèle quelque chose dans une interview avec Alessandro Dell'Orto publiée le 27 août 2011 dans Libero, dans laquelle il se définit, sans demi-mesure, comme " l'inventeur de la musique de trance techno ", parlant du projet initial de " The Age Of Love ", de manière peu généreuse, comme " une sorte de jingle absurde ". "J'ai pris un micro, répétant des choses aléatoires comme 'viens' et ajoutant des sons pour compléter. Après quelques mois, mon ami m'a envoyé un CD avec "The Age Of Love", qui s'est vendu à quatre millions d'exemplaires et qui est le titre de référence pour les personnes qui écoutent cette musique, figurant sur quatre cents compilations. J'ai inventé quelque chose et je ne sais pas quoi !".

 

Il y a plusieurs inexactitudes et informations trompeuses, depuis les parties vocales avec le "come on", précédemment écrites et interprétées par un jeune chanteur, jusqu'à la chronologie des événements : il a fallu au moins deux ans pour que "The Age Of Love" devienne un tube, grâce au remix réalisé en Allemagne par Jam & Spoon. Il ressort également de ces déclarations que Chierchia a également contribué à l'écriture de la base musicale, mais des documents officiels récemment retrouvés dans les archives de DiKi Records le démentent totalement, lui attribuant uniquement la paternité des paroles de la chanson, déposée auprès de la SABAM en avril 1990 et définie à cette occasion comme "rap dance". Chierchia augmente encore la dose dans l'interview éditée par Stefano Di Trapani aka Demented Burrocacao et publiée par Vice le 26 mai 2016 : " J'étais en Belgique chez un ami, un grand éditeur franco-belge, Philippe De Keukeleire, qui m'a dit : " Allez, viens au studio, j'ai une base musicale et j'aimerais que tu l'entendes, peut-être qu'on en fera quelque chose ". C'était vraiment obscène, insupportable, horrible, une batterie faite de cymbales et de caisse claire, sans corps, une basse sans tête ni queue, un clavier qui gémissait dans le fond comme une poule muette avec des coliques. Un véritable accident musical ! Je ne savais pas quoi faire. J'ai joué une séquence répétée à l'infini, j'ai changé tous les pads et j'ai inventé un texte aléatoire, en anglais, debout devant le micro, juste pour faire quelque chose. Puis je suis sorti du studio et j'ai dit à mon ami : "Fais-en ce que tu veux, mais ne mets pas mon nom dessus, pitié ! Prenez soin de vous. Six mois plus tard, c'était le premier succès mondial d'un nouveau genre musical, mais même si je suis cité comme auteur, je me gratte toujours la tête et ne comprends pas. Je ne sais pas ce que c'était. L'histoire raconte que Fleming a découvert la pénicilline à peu près de la même manière... C'est hilarant."

 

Au-delà de la controverse sur qui a fait quoi, ces témoignages et ceux qui suivent montrent que la genèse de "The Age Of Love" était littéralement aléatoire, imprévisible, sans direction et le résultat d'une impulsion créative venue d'on ne sait où. Si Chierchia et Sanchioni se tiennent à l'écart, préférant parler peu ou pas de cet épisode ou ajoutant, comme nous l'avons vu, des détails non fondés susceptibles d'être démentis, d'un tout autre avis est Jean-François Samyn, fils de feu Roger Samyn de DiKi Records, qui est heureux de retracer une phase de sa vie, peut-être la plus émouvante.

 

(à suivre ! ;))

 

 

 

 

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Suite et fin du post précédent avec la longue interview de Jean-François Samyn, qui raconte tout sur la genèse de The Age Of Love et DiKi Records.

 

Citation

Témoignage de Jean-François Samyn de DiKi Records

 


Comment l'aventure Disco King a-t-elle commencé ?


Au début des années 1970, papa, un vrai mélomane, a ouvert un petit club à Mouscron, dans le sud de la Belgique, à la frontière avec la France. Quelques années plus tard, il a ajouté un petit magasin de disques à l'entreprise, spécialisé dans les importations des États-Unis et du Royaume-Uni. Il s'appelait Disco King et était situé au 56 rue du Christ, également à Mouscron. Il s'est lancé dans cette aventure parce qu'il avait besoin d'acheter des disques pour son club et qu'à l'époque, il n'était pas facile de trouver un détaillant qui traitait un certain type de musique. Au fil du temps, il est entré en contact avec d'autres disquaires et grossistes de renom, tels que Hessel Tieter de Music Man, José Pascual de USA Import, Renaat Vandepapeliere de R&S Records et Laurent Vanmeerhaeghe de Big Time. L'industrie du disque était un univers nouveau et très excitant et papa n'a pas tardé à combiner la vente et la production musicale.

 

L'étape suivante était donc la production de disques ?


Exactement. Elle a commencé en 1982 avec "Why Can't We Live Together..." de Mike Anthony sur Ca$h Records, suivi l'année suivante par "Beats Of Love" de Nacht Und Nebel, "La Vie En Rose" de Martinique et "Ha Chica" de Tony McKenzie. Je n'avais que dix-huit ans et j'allais encore à l'école, mais tous les week-ends, je sortais en boîte, fier du travail de mon père. Quelque temps plus tard, alors que la musique new beat commençait à faire son chemin, nous avons rencontré par hasard Bruno Sanchioni, un jeune musicien inconnu, né en Italie mais vivant à Roubaix, qui était très passionné et motivé. Il cherchait un producteur, nous avons donc rapidement signé notre premier accord, le 7 mars 1988, auquel s'est ajouté quelques mois plus tard, le 12 octobre, un deuxième accord concernant le projet Dr. Phibes. Le contrat n'avait pas de date limite, nous étions sûrs qu'un grand succès était à venir. Grâce au soutien du magasin, il a été facile d'avoir accès à tous les nouveaux arrivages des États-Unis et d'Europe et de découvrir les nouvelles tendances sonores avant les autres. Ensuite, heureusement, le nouveau beat était un genre assez facile à composer par rapport aux chansons des grands groupes américains ou britanniques. Mon père m'a donné la possibilité d'apprendre et de vendre des disques dans le magasin le week-end, mais pour moi, comme pour tous ceux qui aiment la musique, ce n'était pas du tout un travail, mais un pur plaisir. Je n'avais pas mon mot à dire sur les productions, mais j'avais le droit de porter des jugements. Sanchioni a commencé à enregistrer avec mon père en 1988, mais les résultats n'ont pas été immédiats. J'ai essayé de lui donner quelques conseils basés sur ma vision en tant que jeune clubber. Il a accueilli les suggestions afin d'obtenir les bons sons des excellentes machines qu'il avait dans le studio (Korg, Ensoniq, Roland, Akai) et a commencé à utiliser quelques échantillons. Quelques mois plus tard, il m'a fait écouter un nouveau morceau sur une cassette et m'a demandé ce que j'en pensais. J'étais complètement envoûtée par ces sons et j'ai couru le dire à mon père. Enfin, un succès ! C'était "Acid Story", le deuxième single de Dr. Phibes. L'enthousiasme s'est encore accru lorsqu'on m'a demandé de monter un groupe pour faire face aux concerts dans les clubs, le new beat devenant un grand phénomène dans les clubs. "Acid Story" est un authentique succès et ouvre une période florissante pour DiKi Records après quelques singles pas particulièrement chanceux ("Noise Gate" de Chico Crew, ""Vachillia" ...6 ?" de Dr. Phibes et "Hardcore Movies" de Doc And Co, tous orchestrés par Sanchioni, nda). Pendant l'âge d'or du new beat, moi, Sanchioni et les gars impliqués dans les projets Dr. Phibes et Bazz avons vraiment fait beaucoup de concerts, chaque week-end dans un club différent. De nombreux souvenirs et rencontres sont liés à cette période. Deux ans plus tard, cependant, un nouveau genre musical apparaît à l'horizon, la techno. Des pièces comme Inner City de Kevin Saunderson ont ouvert la voie, et très vite, nous avons été inondés d'un nombre abyssal de labels et de titres provenant du monde entier. Il ne suffisait plus d'assembler une série d'échantillons, mais il fallait chercher des parties vocales, et Sanchioni semblait un peu paniqué à ce moment-là.

 

 

Comment avez-vous fait face à cette nouvelle phase stylistique qui allait toucher et impliquer la majeure partie de l'Europe ?


Le magasin de disques a continué à être un grand succès. De plus en plus de DJ populaires venaient faire leurs achats chez Disco King, ce qui a déclenché une sorte de concurrence avec les simples fans qui essayaient de mettre la main sur les raretés qui étaient principalement destinées aux professionnels des consoles. C'est à peu près au moment où le new beat a cédé la place à la techno qu'est apparu Emmanuel Top. Je me souviens comme si c'était hier du moment où je l'ai rencontré pour la première fois. Lorsqu'il a franchi le seuil de la boutique, j'ai ressenti une sensation étrange, j'ai ressenti quelque chose de positif en sa présence. Il m'a demandé si nous avions "Rhyme Fighter" de Mellow Man Ace et "The House Of God" de DHS et j'ai dit "bien sûr". Il était presque sans voix. "Enfin, cela fait des semaines que je cherche ces titres, mais en vain !" a-t-il déclaré. À ce moment-là, je lui ai demandé s'il avait déjà entendu parler de notre magasin. "Non, mais j'ai vu Jean Vanesse, DJ au Fifty Five à Kuurne (maintenant CEO de N.E.W.S. à Gand) aller chez un autre disquaire de Menin, Disco Smash, et je l'ai suivi en voiture parce que j'étais sûr qu'il faisait le tour des magasins à la recherche de quelque chose de nouveau à offrir pendant le week-end". Le nôtre était un petit magasin très spécialisé, exactement ce qu'il cherchait. C'était le début d'une véritable amitié. Emmanuel Top est resté un client régulier de Disco King pendant environ un an. Il décide alors d'investir un peu d'argent dans l'achat de divers synthétiseurs et de se lancer dans le studio avec Bruno. La même année, en 1990, Sanchioni rencontre Gregory Dewindt (Master Techno, Total Groove, Deee Maestro etc.) et ensemble ils réalisent les singles "1990 Is Our Space" et "Waresnare" de Dr. Phibes. Pour l'occasion, Gregory a utilisé deux pseudonymes, Gregg Jones et Teddy Jones. L'arrivée d'Emmanuel Top, qui est en fait devenu coauteur avec Sanchioni, laisse Dewindt déçu, il cherche donc de nouvelles voies et signe un contrat avec Sarema. Cependant, grâce à de bons contacts avec Rabah Djafer, le directeur de la société française, nous avons retravaillé ensemble sur plusieurs disques Master Techno. En 1993, Dewindt a enregistré pour DiKi Records "Pacific" de Pacific Trance, qui a été suivi deux ans plus tard par "Jesus Trip" sur le sous-label X-Stream réalisé avec Philippe Toutlemonde aka Phi-Phi (interviewé ici, nda), à l'époque l'un des DJ les plus célèbres en Belgique en raison des disques sortis sur Bonzai. Grâce au succès et à la notoriété obtenus tant avec le magasin qu'avec les productions de disques, nous avons déménagé dans un local plus grand, toujours dans la même rue mais au numéro 101. Là, nous aurions plus d'espace pour le studio et la salle d'écoute, équipée d'un ensemble de Technics SL-1200 mis à la disposition des clients. Cette décision a contribué à l'incroyable succès de DiKi Records.

 

Dans l'ère post new beat, Diki Records a sorti un disque de trance fondamental, "The Age Of Love". Quels sont vos souvenirs ?


Au début de l'année 1990, le magasin est toujours situé au 56, rue du Christ et Sanchioni travaille seul dans l'atelier. Quand il n'y avait pas de clients, j'ouvrais les portes de la pièce et je l'entendais jouer. Il aimait composer très fort et cela m'a donné l'occasion d'entendre la construction de ce morceau du début à la fin. Son dernier succès, "Te Quiero" de Pedro Ramon, qu'il a porté dans les clubs avec de nombreux concerts, était derrière lui et Bruno a commencé à s'ennuyer parce qu'il ne pouvait pas faire de nouveaux morceaux avec de bonnes voix inédites. Dans notre région, il était très difficile de trouver des chanteurs capables d'interpréter des paroles en anglais sans trahir l'accent français. À l'époque, il travaillait sur un morceau instrumental qui, bien qu'encore sous forme de démo, semblait assez prometteur. À l'intérieur, il avait placé quelques échantillons et effets, dont le son d'un avion (ce qui explique la raison du nom des deux versions, Flying Mix et Boeing Mix, nda), le halètement d'un orgasme féminin et un échantillon vocal tiré de "Native House" de MTS et RTT, sorti sur Trax Records de Chicago, qui comprenait à son tour un fragment de "Native Love (Step By Step)'" de Divine, qu'il a utilisé comme ligne de basse. Les caisses claires ont été influencées par "Work That Mutha Fucker" de Steve Poindexter. Quand il a fait la première boucle, je lui ai immédiatement dit que c'était un point de départ intéressant, et je l'ai encouragé à continuer. S'il était enthousiaste, il était aussi frustré de ne pas pouvoir obtenir les voix qu'il voulait. Il est même allé jusqu'à louer des cassettes vidéo dans l'espoir d'obtenir de bons échantillons. Le chant de " House Of Pax " de Bazz, qui dit " je suis venu en paix ", par exemple, est tiré de la version française du film " Dark Angel ". Je vous laisse imaginer de quel genre de films il a tiré les gémissements que l'on entend dans "The Age Of Love". Pas entièrement satisfait du résultat, il demandait sans cesse à mon père de lui procurer des voix à utiliser. Il a été convaincu après avoir fait écouter la démo à ses amis et aux clients du magasin, qui ont été unanimement positifs. La ligne de basse était en effet irrésistible. À l'époque, il y avait un morceau très populaire avec un échantillon qui disait "waouw, c'mon, waouw", ou "Yaaaaaaaaaah" par D-Shake. Bruno (et moi aussi) aimait beaucoup ce morceau et un jour, en l'écoutant, il m'a dit que ce dont il avait besoin pour sa nouvelle démo était un sample comme "c'mon", peut-être chanté par une femme.

 

 

Le sample arrive et la fille qui le joue se fait passer sur internet pour Karen Mulder, non ?


Depuis des années, on parle sur le web d'une prétendue rencontre avec Karen Mulder, invitée dans notre studio pour jouer un petit rôle vocal dans "The Age Of Love", mais tout cela n'est que le fruit de l'imagination de quelqu'un. Les choses se sont passées très différemment, le mannequin néerlandais n'a jamais mis les pieds chez DiKi Records, et encore moins chanté sur ce disque, et j'espère que cet article/interview, par lequel je révèle pour la première fois cette backstory, pourra aider à clarifier les choses. Le chant féminin sur "The Age Of Love" est assuré par Valérie Honoré qui vit maintenant près de Lille, en France. Elle avait dix-neuf ans à l'époque et un après-midi, Sanchioni lui a demandé, alors que nous étions encore au 56 rue du Christ, si elle voulait danser sur scène pendant les spectacles de Pedro Ramon. Elle a accepté. Quelques semaines plus tard, alors qu'ils rentraient d'une série de soirées dans des clubs parisiens, Bruno lui a dit qu'il recherchait des voix féminines pour ses nouvelles productions et lui a proposé de faire une répétition en studio. Elle ne devrait chanter qu'une courte partie, comme les couplets français de "Fade To Grey" de Visage par exemple. Valérie a acquiescé. Une fois en studio, Sanchioni lui a fait écouter la base et elle a été assez étonnée car rien dans la chanson ne ressemblait à Visage. Cependant, elle n'a pas reculé et a écrit quelques phrases en anglais : "Come on dance with me, move your body you like the beat". Bruno a échantillonné la voix et, en deux ou trois heures, l'a placée sur le morceau, mais Valérie, fatiguée, était déjà partie. Quelques mois plus tard, elle rencontre Stéphane Pauwels, DJ à l'époque et aujourd'hui présentateur sportif à la télévision, dans un bar de la ville. Ils sont allés en discothèque ensemble et elle a entendu la chanson avec sa voix pour la première fois. Elle était attristée que Bruno ne l'ait pas recontactée pour l'informer de cette évolution et la remercier. Cependant, elle n'est pas retournée chez DiKi Records et n'a jamais fait de réclamations, car elle était désormais occupée par un autre travail. Fatigué d'assister à la diffusion continue d'informations totalement infondées sur Internet, j'ai entrepris il y a quelque temps de retrouver ce mystérieux chanteur, en contactant Sanchioni ainsi que d'anciens DJ et clients du magasin, mais malheureusement sans succès. La seule information que j'ai obtenue est son nom, Valérie. Grâce à cette interview, j'ai pu entrer en contact avec elle via Facebook et, il y a quelques semaines, elle m'a enfin raconté en détail comment les choses se sont passées en 1990. Valérie est impliquée dans l'artisanat depuis 1998, travaille aujourd'hui comme tapissière et décoratrice et est la mère d'un beau garçon de dix ans. La boucle est enfin bouclée. Je ferai tout mon possible pour que son nom et le texte original qu'elle a écrit figurent sur la couverture des prochaines rééditions de "The Age Of Love".

 

Quand Giuseppe Chierchia est-il entré en jeu ?


Pendant la période où Sanchioni travaillait sur la base de "The Age Of Love", mon père a commencé à sortir quelques titres, comme "Baby Phibes" de Dr. Phibes, "The Right Song" de Neal Fox et le susmentionné "Te Quiero" de Pedro Ramon, en coopération avec Philippe De Keukeleire d'Alpina Records et Carrera Records. Philippe était le fils de Marcel De Keukeleire, producteur de la célèbre chanson "La Danse Des Canards" de J.J. Lionel (connue en Italie sous le nom de "Il Ballo Del Qua Qua", chantée par Romina Power). Sachant que Sanchioni cherchait désespérément un chanteur, mon père lui a demandé de l'aide. Le hasard a voulu que De Keukeleire se trouve ce jour-là en compagnie d'un chanteur italien, Giuseppe Chierchia, plus connu sous le nom de Pino D'Angiò, qui est venu le voir car ils sont de bons amis. Une demi-heure plus tard, Chierchia était déjà dans notre studio pour enregistrer le chant, la partie instrumentale étant déjà terminée. Mon père et Bruno ont décidé d'appeler la chanson "The Age Of Love" en s'inspirant du sample de "Native Love (Step By Step)" produit par Bobby Orlando. Chierchia, à son tour, s'est laissé emporter par le titre pour écrire un texte et l'enregistrer en quelques heures. Sanchioni était certainement heureux ce jour-là, car il avait un autre Italien dans le studio avec qui s'amuser et beaucoup de rires. Une fois la partition terminée, elle a été déposée à la SABAM mais avec une erreur : le passage vocal " you like the beat " a été remplacé par " your life is beat ". Mais ce n'était pas intentionnel. Chierchia n'avait jamais rencontré Valérie Honoré, leurs parties respectives ont été enregistrées à des moments différents, et comme personne n'avait pris la peine de noter le texte de ce court insert vocal enregistré comme preuve, les mots qui semblaient avoir été prononcés par Valérie pendant ces quelques secondes ont été transcrits. Les quatre versions sont terminées et envoyées à l'imprimerie quelques semaines plus tard, mais le succès n'est pas immédiat, bien que tous les exemplaires du premier tirage soient rapidement vendus. Deux ans plus tard, quelques jours avant la fin du Midem, Hessel Tieter de Music Man a dit à mon père qu'il était dommage qu'il ne soit pas à Cannes parce que Thomas Foley de British React cherchait un contact chez DiKi Records pour une pièce de catalogue appelée "The Age Of Love". Nous avons été assez surpris car il s'agissait d'une ancienne production.

 

 

Entre-temps, de nombreux autres titres ont été publiés sur DiKi Records.


Oui, exactement, nous avions sorti plusieurs titres composés par Sanchioni et Emmanuel Top, sentant que l'arrivée de ce dernier représentait un grand élan de motivation pour Bruno. Afin de nourrir cette fertilité créative, nous avons acheté de nouveaux instruments de studio comme un Roland TB-303 et un Roland TR-909. Emmanuel Top a également commencé à jouer régulièrement dans des clubs comme le Boccaccio, le Fifty Five et le Villa, tous très populaires en Belgique. En plus de cela, il y avait l'importation massive de techno et de house des États-Unis, l'influence de Chicago et de Detroit a été cruciale pour nous. C'était un moment fantastique à tous égards. Le premier vrai grand succès de DiKi Records, qui est devenu un classique en Belgique, est "Cactus Rhythm" de Plexus, sorti en 1991. Pendant que je vendais des disques dans le magasin, Bruno et Emmanuel composaient de la musique dans le studio à l'étage, à la recherche constante du bon son. À l'époque, le style de Frank De Wulf et de R&S Records était l'un des plus populaires et des plus recherchés par nos clients, mais Emmanuel n'arrivait pas à obtenir le bon son. Je lui ai suggéré de prendre le "Mentasm" de Second Phase comme modèle, de mettre le disque sur le plateau et de proposer de l'échantillonner mais de le jouer à l'envers, peut-être en le croisant avec le "waouw" de "100% Of Disin' You" d'Armando, lui-même tiré de "My Loleatta" d'Ellis-D qui retravaille la voix de Loleatta Holloway. Il m'a regardé et a couru jusqu'au studio. Quelques heures plus tard, il est revenu avec un DAT que j'ai fait écouter à plusieurs clients dans le magasin. Ils ont afflué pour en demander une copie, c'était fou, et Emmanuel m'a fait un clin d'œil. Quelques semaines plus tard, c'est devenu un succès.

 

Comme nous l'avons déjà mentionné, Sanchioni a réalisé plusieurs productions pour DiKi Records avant 'The Age Of Love'. L'un de ses projets les plus populaires reste le susmentionné Dr. Phibes, qui a servi de passerelle entre le new beat et la house/techno. Comment le public a-t-il réagi lorsque les différentes formes de styles électroniques ont commencé à se répandre dans la seconde moitié des années 1980 ?


Avant le fameux "The Age Of Love", Sanchioni a touché le jackpot avec Dr. Phibes et Bazz, mais Pedro Ramon a également bien réussi. Te Quiero" de 1989 était clairement inspiré par le "Sueño Latino" italien et a été particulièrement bien accueilli à la radio, tout en étant le premier titre que nous avons signé sur Network Records du groupe britannique Kool Kat. Acid Story " de Dr. Phibes et " The Drop Deal " de Bazz ont parfaitement représenté Bruno et son groupe pendant la période du new beat, avec un succès particulier en Belgique et en France. Le public se déchaînait lorsque de nouveaux groupes de beat se produisaient sur scène, spécialement habillés avec de grands visages souriants et des logos métalliques de marques automobiles comme Mercedes ou Volkswagen. Si vous possédiez une voiture de l'un de ces constructeurs à l'époque, vous deviez faire attention à ne pas vous faire voler les symboles de la carrosserie ! Pour aller dans certaines discothèques à l'époque, il fallait presque se déguiser. Les morceaux de Dr. Phibes et Bazz étaient toujours mixés avec 'The Sound Of C...' de Confetti à la fin des nuits à l'Amnesia à Ibiza. Dans ces années-là, il y avait d'énormes événements avec beaucoup de nouveaux groupes de beat et parfois, en raison du succès qui nous a amenés au sommet du hit-parade, l'accueil était exagéré. Les producteurs de cette musique étaient considérés comme de véritables stars. En ce qui concerne les autres chansons, le succès a été moins évident, également parce que, en l'absence d'internet, pour se faire connaître à l'étranger, il fallait conclure des accords de licence avec d'autres maisons de disques afin de pouvoir compter sur une large distribution de ses produits. La concurrence était féroce et le favoritisme envers certains labels n'a pas manqué. Aujourd'hui, les choses sont complètement différentes et nous sommes heureux de recevoir des messages de fans du monde entier nous félicitant pour la musique que nous avons sortie il y a trente ans (et plus). Il était important pour DiKi Records de faire partie du mouvement new beat, qui a donné naissance à la danse électronique. Cela a duré quelques années, mais c'était très intense. En 1990, l'arrivée de la techno en Europe l'a rendu encore plus intrigante.

 

Pensez-vous donc que la musique new beat puisse être considérée comme un point de départ pour la techno et la trance européennes ?


Sans l'ombre d'un doute, le new beat fait partie intégrante des débuts de la dance music continentale, mais à mon avis, ce phénomène a commencé peu de temps auparavant, également en Belgique, avec ce qu'on appelait l'AB Music jouée à l'Ancienne Belgique, un club de Bruxelles où les morceaux enregistrés à 45 tours étaient joués à 33 tours mais augmentés à +8 avec le pas de la platine. Au moment où la nouvelle musique rythmique fait rage, de grands succès sortent du Royaume-Uni, de l'Allemagne et des États-Unis, comme "Jesus Loves The Acid" d'Ecstasy Club, "Monkey Say, Monkey Do" de WestBam et "The Party" de Kraze. La musique, par rapport à aujourd'hui, était consommée d'une manière radicalement différente. Il était impensable de rester chez soi et de se contenter d'écouter la radio si l'on recherchait certains titres, il fallait se rendre physiquement chez les disquaires spécialisés pour acheter des genres particuliers.

 

Parlons de "The Age Of Love", sorti en 1990 lorsque la trance était encore une sorte de prototype. Combien d'exemplaires ont été vendus au départ ?


Habituellement, à cette époque, nous imprimions 1000 à 2000 exemplaires par sortie. J'ai récemment trouvé un vieux document dans les archives concernant une réédition de septembre 1990 de DIKI 47.12.12, 'The Age Of Love', 720 copies. En bref, c'est un disque qui a été assez limité dans sa phase initiale, et je ne pense pas que l'on puisse même parler d'un succès national. D'autres titres de DiKi Records, comme Plexus, ont suscité des réactions plus enthousiastes, mais dans le passé, il était impossible de savoir immédiatement si la musique que vous sortiez avait du succès dans d'autres pays, il fallait attendre. Il est également arrivé, en raison du manque de disponibilité, que quelqu'un imprime illégalement des bootlegs en marque blanche, comme "Auto Shutter" de Plexus au Royaume-Uni. Distribuer vos produits à des milliers de kilomètres était un problème et obtenir des informations de l'étranger n'était pas aussi facile qu'aujourd'hui. Nous n'avions pas réalisé l'énorme potentiel de "The Age Of Love", mais surtout, personne ne pouvait prédire qu'il deviendrait l'un des plus grands classiques de la trance de tous les temps.

 

Et le remix de Jam & Spoon ?


Je me rappelle exactement quand je l'ai entendu pour la première fois. C'était l'été et nous étions près d'un entrepôt en France que nous utilisions pour exporter des disques vers l'Italie et divers magasins là-bas. Mon père m'a appelé et m'a dit : "Jeff, je viens de recevoir la cassette du remix de 'The Age Of Love'". Écoute-le dans la voiture et dis-moi ce que tu en penses". Je l'ai écouté en voiture et j'ai été immédiatement surpris par la partie rythmique, plus prononcée que l'original, mais surtout par l'intro : l'intensité des sons a augmenté et j'ai été obligé de baisser le volume pour garder mon attention en conduisant. Je me suis demandé à quoi servait cette étrange construction, mais quelques secondes plus tard, c'était comme si j'entrais dans un rêve. Wow ! Je l'ai écouté plusieurs fois et quand je suis retourné voir mon père, je lui ai dit que ça allait être un succès, j'en étais presque sûr. Si j'avais pu changer quelque chose, j'aurais peut-être changé les sons stridents qui précèdent les refrains fantastiques, mais il a insisté et m'a dit que c'était ce qui rendait le remix génial. J'ai passé la cassette plusieurs fois dans le magasin, qui avait depuis déménagé au 101, et tous les clients m'ont demandé le titre. À ce moment-là, j'étais définitivement convaincu. Je ne remercierai jamais assez Jam & Spoon pour le travail qu'ils ont accompli. Le destin a voulu que le jour même où Mark Spoon est mort, un de mes fils est né. Mes pensées se sont tournées vers lui, je ne l'oublierai jamais. Je pense que leur version reste la meilleure à ce jour. C'était une excellente carte de visite pour les DJ sets dans les clubs et les futures productions. React a commandé le remix et a repris la gestion de "The Age Of Love" dans le monde entier, à l'exception du Benelux, de la France, de l'Allemagne, de l'Autriche et de la Suisse, selon un accord signé le 6 avril 1992. La seule chose que je regrette est que les remixes de "The Age Of Love" ne soient jamais sortis sur DiKi Records. Je suis sûr qu'ils auraient donné encore plus de prestige au label qui, quoi qu'il en soit, a réussi à se faire une place avec sa musique et ses artistes. Environ un an plus tard, il est élu "label du mois" par le magazine allemand Frontpage, grâce aux productions de Joey Beltram (X-Buzz), Acid Kirk et Sebastian S. (Cyberpsychose). (Cyberpsychose), Kelli Hand (Etat Solide) et Antoine Clamaran (GTD). Puis c'est le tour de Luc Devriese, qui arrive quand Emmanuel Top décide de poursuivre sa carrière en tant qu'indépendant et fonde Attack Records. J'ai été très attristé par sa décision, car avant d'être un compositeur, il était un ami, mais peut-être est-ce le destin de tout artiste d'essayer de réussir sans l'aide des autres. Sanchioni, bien que satisfait, le suit et crée peu après le projet BBE, auquel se joint également Bruno Quartier. Ils ont eu beaucoup de succès, mais il était inévitable qu'ils travaillent à nouveau ensemble.

 

 

"The Age Of Love' aurait-il été complètement oublié sans le mix club Watch Out For Stella de Jam & Spoon ?


Je suis un admirateur de la musique de Jam & Spoon. Parmi mes préférés figurent les deux "Tripomatic Fairytales", le remix de "Go" de Moby et, bien sûr, les chansons interprétées par Plavka. Nous avons vendu beaucoup de leurs disques au magasin, "Tripomatic Fairytales 2001" est devenu un véritable classique au Disco King. Je crois fermement que "The Age Of Love" n'aurait jamais atteint les résultats étonnants que l'on connaît s'il n'avait pas été soutenu par les remixes qui sont sortis au fil des ans. Au cours du partenariat avec React, mon père et Thomas Foley ont constamment insisté pour que tous les remixes s'inspirent de la version originale de Sanchioni. À cet égard, je me souviens que React a rejeté le premier remix de Paul van Dyk, le jugeant trop semblable à celui de Jam & Spoon, et a demandé un second remix qui avait plus de points communs avec l'original. Il comprenait mais savait qu'il lui serait impossible de faire mieux. Toutes les versions ultérieures, y compris celle d'Emmanuel Top, ont été composées et construites avec l'intention spécifique de ne pas ressembler à celle de Jam & Spoon, c'était un must. Un peu plus de trente ans plus tard, le remix le plus souvent joué dans les clubs et lors de grands événements est toujours celui de Jam & Spoon, qui entre-temps est aussi devenu LA référence pour de nouvelles générations d'artistes. Nous continuons à recevoir des remixes, trop nombreux je dirais, mais tous ponctuellement similaires. Le dernier, par ordre d'apparition, est celui de Solomun, un artiste pour lequel j'ai du respect, mais sa réinterprétation n'est pas du tout inspirée de l'original de 1990. Je préfère le travail réalisé par M. Sam et Fred Baker, qui révèle une réinterprétation complète de la chanson, mais je comprends que celle de Jam & Spoon soit désormais considérée par un public de plus en plus large comme la version originale. Il sera difficile de changer cette perception. Pour assurer la survie du titre et encourager les nouveaux artistes à faire mieux, nous devons encore refuser beaucoup de remixes.


Pensez-vous que "The Age Of Love" peut être considéré comme l'un des premiers morceaux de trance de l'histoire ?


Au début des années quatre-vingt-dix, il y avait beaucoup de bons morceaux dans une grande variété de genres. C'était une époque fabuleuse et le meilleur était à venir, mais par rapport à son histoire, je dois dire, avec la plus grande humilité, que c'est peut-être l'un des morceaux qui a lancé le mouvement de la trance et qu'il reste l'un des meilleurs dans cette veine. Lorsque j'essaie de me souvenir d'autres morceaux de trance que j'ai aimés, je me rends compte qu'ils sont tous postérieurs à "The Age Of Love". Je ne sais pas combien d'années encore ce titre figurera dans les sets des DJ, mais il est indéniable qu'il fait partie intégrante de l'histoire de la musique électronique mondiale et qu'il parvient à parler à plusieurs générations.

L'âge d'or de la musique en vinyle est révolu depuis longtemps et ne peut être répété. Quel souvenir gardez-vous des meilleures années de Disco King ?
Le Disco King, situé au 56 rue du Christ, était à toutes fins utiles une "création" de mon père, qui est malheureusement décédé prématurément il y a un peu plus de vingt ans (le 9 décembre 2000). Je ne peux donc pas dire avec une certitude absolue quelle a été la période la plus profitable et la plus fructueuse, mais pour moi, ce magasin a représenté le début de mon aventure dans le monde de la musique, et je m'en souviens donc avec une infinie affection. Mon père était heureux comme un poisson dans l'eau et les deux années que j'ai passées là-bas m'ont promis de nombreux succès. Le Disco King qui a rouvert sur la 101 a été un véritable défi pour moi, car c'est moi qui ai convaincu papa de l'agrandir. Mon objectif était de figurer dans le top 5 des disquaires belges et il m'a fallu des années pour y parvenir. J'étais toujours à la recherche de disques exclusifs, et les contacts directs avec les grossistes américains nous ont beaucoup aidés à attirer l'attention des meilleurs DJ de clubs qui venaient nous voir.

 

Quel est votre souvenir le plus marquant de DiKi Records dans les années 90 ?


Comme je l'ai déjà dit, la production des disques était gérée par mon père. Après le départ de Bruno Sanchioni et d'Emmanuel Top pour entamer un nouveau parcours en tant qu'indépendants, l'atmosphère a changé. Nous nous sentions comme des orphelins et nous avons commencé à établir des liens avec d'autres artistes qui avaient déjà entendu parler de nous. Nous avons également commencé à accorder des licences pour les pistes qui fonctionnaient bien dans les clubs, et le fait d'être un habitué des clubs m'a aidé à identifier les pistes sur lesquelles parier et dans lesquelles investir de l'argent. En 1992, Luc Devriese, qui travaillait au légendaire Boccaccio, est venu nous rendre visite à l'atelier et nous avons immédiatement établi une très bonne relation. C'est le début de sa nouvelle aventure artistique après des dizaines de sorties précédentes sur Target Records. Il avait un studio d'enregistrement à Gand et m'a demandé quelques idées pour créer des morceaux forts. Ensemble, nous avons produit plusieurs hits comme "Acid Creak" de Spokesman, "Midnight In New York" de Michael Sanctorum, "Wake Up", "Breath Of Life" et "Emotive Skin" de Trance Team, "Spring Of Life" de Brainwave, "Just A Little Bit Of Love" de Bruce Bap's et d'autres. À partir de 1992/1993, tout s'est passé très spontanément et naturellement. De nombreux DJ, compositeurs et artistes sont venus nous voir et ont contribué à écrire l'histoire de DiKi Records. Ils étaient tous enthousiastes à l'idée de sortir leur musique sur notre label et, au final, ce qui a fait le succès du label, c'est, à mon avis, la grande diversité des artistes et des styles. Je me souviens de tant d'anecdotes. La première concerne "Rio" de DJ M.D. : après avoir écouté la démo, j'ai essayé de convaincre mon père de ne pas sortir ce titre parce que je ne l'aimais pas du tout. Mais il n'a pas suivi mon conseil et l'a sorti sur le sous-label Porshe Records, ce qui a été une bonne chose car, en quelques semaines, "Rio" est devenu très populaire, devenant l'un des meilleurs succès de DiKi Records en termes de ventes et de nombre de compilations en Belgique et en France. J'étais vraiment étonné. La deuxième anecdote est liée à l'Italie puisqu'elle concerne "Children" de Robert Miles. Nous avons été les premiers à l'inclure dans un CD de compilation, "Welcome To The Club", mais naïvement, nous n'avons pas pensé à en obtenir les droits exclusifs. Roberto Concina nous a confié, à l'occasion d'un événement organisé en décembre 95 pour célébrer l'anniversaire de DiKi Records, que c'est grâce à nous qu'il a été signé pour la première fois à l'étranger. Ne pas avoir été assez prévoyant pour son "Children" (dont nous parlons ici, nda), qui est rapidement devenu un succès mondial, reste l'un des plus grands regrets que je porte en moi. La troisième anecdote est liée à "Traky" de People Of Cactus : j'ai été réveillé au milieu de la nuit par un type qui écoutait de la musique très forte dans sa voiture et qui, s'étant arrêté pour laisser quelqu'un entrer ou sortir devant ma maison, a ouvert la porte. Le son était si fort qu'il m'a immédiatement tiré de mon sommeil. Il n'y avait aucun moyen de me rendormir et de faire sortir cette mélodie de ma tête. Le lendemain, j'ai cherché le titre ('Tracky' de Formic, extrait du EP 'Trick Tracks' sur Formic Records, 1995, nda) et j'ai contacté le producteur en lui faisant part de mon intention de le céder sous licence et de le faire remixer par Emmanuel Top. Il n'était pas intéressé par ce genre d'accord mais était prêt à y renoncer complètement. A ce moment-là, je suis devenu le compositeur du titre avec Bruno Sanchioni et 'Traky' est devenu un hit, joué dans tous les clubs de Belgique entre fin 1998 et début 1999. Pourquoi les People Of Cactus ? Tout simplement pour créer une sorte de lien avec "Cactus Rhythm" de Plexus, que j'ai fait des années auparavant avec Sanchioni et Emmanuel Top. Je cherchais un moyen d'expliquer aux gens que c'était toujours nous et j'ai donc opté pour ce pseudonyme, certain que les fans les plus attentifs comprendraient. 

Enfin, la dernière anecdote concerne l'artiste écossais Stephen Brown qui devait réaliser un DJ set le 17 décembre 1999 lors d'une autre fête d'anniversaire de DiKi Records. L'événement a eu lieu à La Bush, l'un des plus grands clubs de Belgique, qui était plein à craquer. L'atmosphère était parfaite et le public était très enthousiaste. Brown ne se doutait pas qu'il serait aussi populaire et m'a demandé de lui suggérer quelque chose pour son programme ce soir-là, prétextant qu'il avait l'habitude de jouer dans un petit club d'Édimbourg et qu'il ne voulait pas risquer de décevoir le public. Lorsqu'il a mis son "My Drums", sorti quelques mois plus tôt sur DiKi Records, le club a semblé exploser.

 


Mais tout a changé depuis cette époque.


Aujourd'hui, il est tout simplement impossible de générer les chiffres records des années 80 ou 90. Il y avait un système qui reposait sur les magasins de disques, les discothèques et les publications de disques : si vous vouliez être à la page, vous deviez acheter des disques, mais pour savoir lesquels acheter, vous alliez dans les clubs en essayant d'"extorquer" les titres au DJ, ou vous restiez collé à la console en espérant les trouver vous-même pendant qu'ils tournaient sur les cymbales. En bref, il s'agissait d'un véritable cercle vertueux qui soutenait l'ensemble du secteur. Lorsque nous organisions des événements spéciaux, des centaines de personnes venaient au magasin le lendemain pour demander à acheter les mêmes disques que le DJ avait joués la veille. De peur de les manquer, certains gars attendaient l'ouverture à l'extérieur et ne rentraient même pas chez eux pour dormir. Il y avait aussi ceux qui achetaient des cassettes aux DJs et nous les apportaient ensuite en nous demandant de les écouter pour trouver tous les titres et les acheter. Afin d'éviter la foule, j'ai fait installer plusieurs platines avec des écouteurs pour que chacun puisse faire son propre truc. Il y avait un inconvénient à cela, les gens manipulaient beaucoup de matériel et endommageaient parfois des copies, mais ce n'était pas un problème car nous vendions plus de mille disques par semaine. Maintenant, tout est différent. On peut écouter de la musique d'un simple clic de souris, et quand on achète un disque, il arrive intact, toujours emballé dans du cellophane. Je ne pense pas que notre magasin aurait encore une raison d'exister, du moins dans la vieille tradition de la vente de musique. Je vais dans les magasins de disques, mais pour être honnête, je n'ai jamais trouvé la même atmosphère qu'à cette époque. 2000 et 2001 ont été définitivement difficiles pour moi. En 2000, mon père est décédé d'une crise cardiaque à l'âge de 58 ans, et en 2001, mon ami Mikka, collaborateur de longue date de Disco King, aimé des clients et très influent sur la musique que nous produisions, est également décédé d'une crise cardiaque. Une maladie rare l'a emporté à l'âge de 29 ans. Ce fut un véritable choc pour moi et le début de la fin de cette merveilleuse aventure dans le monde de la musique. Le climat de travail a changé, je n'avais plus envie d'être au sommet et la crise du marché du disque a entraîné la fermeture de nombreux magasins de disques. Je craignais pour l'avenir du Disco King et j'ai arrêté de travailler comme producteur. Si je me souviens bien, les dernières sorties que j'ai faites étaient celles d'Alex Peace, Doug Van Zant et Robert Armani, entre 2004 et 2005. C'est à ce moment-là que j'ai créé une usine de pressage de disques appelée Vinylium, même si l'ère du numérique était très proche. J'étais sûr que le disque survivrait à cette tempête.

 

 

Comment vous êtes-vous entendu avec Vinylium ?


L'entreprise a démarré en 2007 et c'est à ce moment-là que j'ai réalisé le rêve de mon père. Mais la vie est imprévisible et, à peine deux ans plus tard, j'ai vécu quelque chose de terrible. J'ai commencé à avoir des douleurs et après avoir subi une série de tests médicaux, on m'a diagnostiqué un cancer de la moelle osseuse. Pour des raisons évidentes, j'ai dû tout mettre de côté. Le magasin a été vendu tandis que l'usine a été démantelée et le matériel exporté à Séoul pour le marché asiatique. C'était frustrant mais, après une longue bataille soutenue par les progrès de la médecine, j'ai réussi à vaincre la maladie. Vinylium a redémarré en tant que service et je travaille comme courtier pour la société française de pressage de disques MPO. La propriété de DiKi Records, y compris l'ensemble du catalogue, a été reprise en 2017 par un amateur de musique qui m'a demandé de continuer à m'occuper de certaines formalités administratives, bien que N.E.W.S. gère le tout, sous contrat jusqu'en 2021. Nous envisageons un éventuel retour sur le marché, mais les règles du métier ont radicalement changé, il faut donc bien peser les choix. Je suis conscient que de nombreux nostalgiques aimeraient revivre certains moments cultes du passé, mais les temps ont changé et avec eux les goûts, les préférences et les attitudes des jeunes générations. Le désir de remonter le temps pour retrouver des émotions perdues ne concerne pas seulement la musique, mais nous devons aller de l'avant. J'espère que les nouvelles générations pourront s'amuser au moins autant que nous l'avons fait. Je suis sûr qu'il y a encore beaucoup de bonnes choses à venir.


Cet article est dédié à la mémoire de Roger Samyn (1942-2000)

 

Modifié par Moratto
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Wow, beaucoup à lire, mais c'est très, très intéressant ! On se rend mieux compte de comment ça fonctionnait concrètement.

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Sortie d'un nouveau remix par Charlotte De Witte et Enrico Sangiulano

La VO est parfaitement respectée, tout en prenant un coup de jeune 

 

The Age Of Love (Charlotte de Witte & Enrico Sangiuliano Remix)

 

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Il y a 9 heures, Ygrek a dit :

Sortie d'un nouveau remix par Charlotte De Witte et Enrico Sangiulano

 

Et pour ceux qui ne connaîtraient pas encore Charlotte de Witte, je rappelle que je lui avait consacré un topic : topic Charlotte de Witte

 

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Pas mal cette version meme s'ils ne se sont pas trop foulés non plus.

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Un nouveau remix par les producteurs Français APM001 & Blac, pas la plus nerveuse bien au contraire, mais ce côté plus atmosphérique colle finalement assez bien au titre, c'est assez différent de ce qu'il y a eu jusqu' ici.

 

 

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